Mounier voulait tout donner pour l'ASSE et revient sur son prêt annulé
Formé à Lyon mais issue d'une famille supportrice de l'AS Saint-Étienne, Anthony Mounier a bien cru porter le maillot vert en 2017. Présenté officiellement à la presse, le milieu offensif a finalement quitté le Forez sans avoir joué, sous la pression des groupes de supporters. Dans le Podcast "Histoires de foot", il revient longuement sur son arrivée avortée à Sainté.
Anthony Mounier : "Je ne voulais pas revenir en France, je voulais jouer. Je suis français, j'avais un marché en France avec le passif que j'avais en Ligue 1. J'ai le coach Christophe Galtier qui m'appelle, qui est en poste à Saint-Étienne, que j'ai connu parce qu'il était adjoint d'Alain Perrin à Lyon. Il m'appelle et me dit : "Anthony, je suis intéressé, quelle est ta situation, est-ce qu'il y a une possibilité de te faire revenir ?" Je le vois comme une opportunité et je dis oui. Il faut que je joue et je ne peux pas rester six mois de plus sans jouer.
Il faut savoir qu'à ce moment là Saint-Étienne est en Ligue Europa, ils ont un tour qui arrive face à Manchester United. C'était un deal intéressant pour eux et pour moi. J'avais une option d'achat liée à mes performances et aux résultats sportifs du club. C'était tout bénef pour moi. On se met d'accord, je suis ok pour les rejoindre malgré mon passif d'ancien lyonnais. Je prends l'avion, j'arrive à l'aéroport, le team manager de l'ASSE m'attend. J'allume mon téléphone et je reçois des messages de partout. Je vois des messages avec des photos, des banderoles déployées dans la ville, une au stade et une au centre d'entraînement : "Mounier : Nos couleurs ne seront jamais les tiennes". On fait le point avec mon agent, on demande ce qu'il se passe et si le club est sûr qu'il n'y aura pas de problème : "Non, non pas de problème, on fait la visite médicale, on signe."
Je fais donc la visite médicale, je signe et je rejoins l'équipe qui était en mini-stage à Toulouse avant un match au Stadium. Je fais connaissance avec le groupe, tout se passe bien. À l'hôtel la veille du match, le coach accompagné du Directeur Sportif (ndlr ; Dominique Rocheteau) et d'un membre de la sécurité frappe à ma porte et me disent : "On va ralentir un peu, parce que ça prend des proportions importantes. Les supporters sont venus au centre d'entraînement, ils ont menacé, ils ont dit qu'ils ne voulaient pas te voir jouer avec les couleurs. Donc, pour ce match, on ne va pas te faire jouer." Il faut savoir que tu ne peux pas faire trois clubs dans la même saison. Si je rentrais avec Saint-Étienne et que ça se passait pas bien, qu'on devait arrêter, je n'aurai pas pu resigner dans un troisième club.
On temporise et puis c'est vrai que ça a pris des proportions énormes. Les supporters étaient déterminés. "On ne veut pas qu'il joue pour Saint-Étienne, si il rentre contre Manchester United on va faire annuler le match, jeter des projectiles..." c'était chaud. J'ai reçu des menaces de mort. À cette époque là, je n'avais pas de réseaux sociaux, heureusement je pense. Beaucoup de choses ont été dites et écrites. Personnellement, ça faisait un peu peur. C'était surtout pour ma famille, j'habite à une heure de Saint-Étienne. La plupart des gens de ma famille sont des supporters de l'ASSE. Mon papa est un grand fan de Saint-Étienne. J'avais dit lors de la conférence de presse de présentation, que j'étais prêt à rencontrer les groupes de supporters pour leur expliquer ce qu'il s'est dit il y a une dizaine d'années, c'était à chaud pendant un match mais je ne vais pas mettre le maillot de Saint-Étienne et boycotter le club. Je viens ici pour tout donner, comme dans tous les clubs où je suis passé et il n'y aura pas de problème. Donner moi la chance de démontrer ça. Ça n'a pas pu être possible.
Il faut remettre dans le contexte, je suis formé à Lyon, à chaques fois que je vais jouer à Saint-Étienne, je suis sifflé, insulté mais ça fait partie du jeu. Ce qui est marrant, c'est que je crois que Saint-Étienne est ma proie favorite en Ligue 1, c'est l'équipe contre qui j'ai marqué le plus de buts. On joue là-bas à Geoffroy-Guichard avec Nice, on joue le maintien. On va à Saint-Étienne ce n'est jamais un environnement facile là-bas. Dès que je touche le ballon, je me fais siffler, insulter, pour mon passé lyonnais. On gagne 3-2 ce match là, je marque deux buts et sur le troisième but que l'on marque, c'est François Clerc qui marque qui est un ancien lyonnais aussi. Il marque et c'est vrai que sur le moment où on court, on se retrouve, j'ai des paroles déplacées envers les supporters de Saint-Étienne, parce que c'était un peu notre derby à nous avec François Clerc (ndlr, "on les ba*** les Verts). J'ai aucun geste envers la tribune, c'est vraiment en interne lorsqu'on se regroupe et juste derrière la cage, il y a une caméra, une petite caméra d'OGC Nice TV. Ça ne fait pas de bruit à ce moment-là. Quand je signe à Saint-Étienne, il y a un supporter qui retrouve le passage et le met sur les réseaux sociaux. Il met cette phrase là sur Twitter et là c'est parti. Saint-Étienne c'est un club où les fans sont très engagés. La phrase part, comment on peut signer un joueur comme ça, tout le monde se monte la tête et ça prend des proportions incroyables. Ils arrivent au centre d'entraînement, le président me dit qu'il pense qu'il peut régler la situation, que c'est une minorité etc... Ils arrivent au centre d'entraînement nombreux, menaces "si je le croise en ville, je lui casse les jambes. Si je dois faire de la prison je ferais de la prison, c'est pas grave." Des trucs de malades. Et là, le club envisage même de me laisser dormir au centre d'entraînement avec la sécurité. Je leur dis "attendez, ce n'est pas une vie. Je ne peux pas dormir tous les jours au centre de formation avec de la sécurité et rester dans ces conditions là."
Le contrat étant signé, on est obligé de trouver rapidement une solution. L'ASSE m'exfiltre de Toulouse en avion, j'attends avec la sécurité à l'hôtel à Lyon. Il restait 48 heures de mercato."