Comment l'ASSE s'est relevée après la caisse noire ?

Anciens Verts | Publié le par Joris | 6 commentaires

André Laurent s'est confié sur ses vertes années dans le podcast Dessous de Vert. Comme nous l'avons évoqué sur le site, l'ancien président de l'ASSE était arrivé aux commandes du club juste après l'épisode de la caisse noire

André Laurent explique en détails les coulisses de son arrivée à l'AS Saint-Étienne : "J’ai compris quelque chose très jeune : c’est qu’on ne fait jamais rien tout seul. Il faut constituer une équipe et si j’ai réussi dans mon métier c’est que j’ai constitué des équipes à la fois sur le plan technique, sur le plan structurel, sur le plan expertise comptable-juridique. Former une grande équipe homogène. Mon entreprise est née dans la vallée de l’Ondaine dans une région où la boulonnerie était le coeur de la production. (...) Ensuite très jeune, la vie, encore une fois les rencontres m’ont fait devenir président d’un club de sport, m’ont conduit à entreprendre des choses qui ont fait que peu à peu je suis apparu sur la scène stéphanoise. Mon visage apparaissait des fois dans la presse, on m’entendait, on me voyait. Lorsque le club s’est effondré, le maire de la ville, François Dubanchet, m’invite à déjeuner pour me dire : « Cher André, j’ai besoin de vous. Les présidents à l’ASSE se succèdent, rien ne va plus, le public gronde. Nous donnons une très mauvaise image de notre cité, cette histoire de la caisse noire est accablante. Il faut qu’on sorte de cela, qu’on trouve un nouveau président, notre conseil d’administration vous a sélectionné, nous voulons que ce soit vous. » J’ai beaucoup hésité, parce que j’avais 44 ans, une entreprise, de jeunes enfants et dans un milieu que je ne connaissais pas. En réalité, je n’ai pas beaucoup hésité, il ne m’a pas beaucoup laissé le temps. Il disait que les gens, pour obtenir quelque chose d’eux, il faut les flatter, plus ils sont importants, et plus il faut prendre un pinceau large. Il m’a fait l’honneur ce jour-là de sortir son pinceau le plus large pour me dire qu’il y avait que moi, que c’était mon devoir. Quelques minutes après j’acceptais et je devenais trois mois plus tard président des Verts. J’étais un membre élu, j’étais bénévole."

André Laurent explique que le modèle était tout à reconstruire : "Le matin très tôt j’étais à mon usine. À partir de 10 heures du matin, tous les jours, j’allais visiter des entreprises industrielles, services, commerces pour présenter le projet d’entreprises ASSE. Parce que les recettes de guichets ne représentent que 33% maximum du budget. Les 70% il fallait les trouver. Il n’y avait pas de droits télévisuels à l’époque. Les ressources des clubs c’étaient les recettes des guichets et le sponsoring. Pendant 10 ans, je me suis battu comme un fou, au quotidien, je n’étais pas seul, j’avais des amis, deux secrétaires et des personnes qui m’aidaient bénévolement pour convaincre des entreprises de rentrer dans le club des sponsors, le VIP, acheter des parts de places… C’était passionnant et vraiment dévorant. Je pense que nous avons très bien travaillé. Nous n’avons pas été champions de France, nous n’avons pas gagné la Coupe de France, on aurait pu à deux reprises mais ça s’est malheureusement mal fini, deux fois en demi-finale. Le succès ne vient pas forcément couronner tous les efforts qui ont été faits. Ils arrivent après ou avant. Moi j’ai hérité d’un club, il fallait un entrepreneur qui restructure, qui rebâtisse. Nous n’avions plus de sponsors, nous avons joué plusieurs mois sans sponsor maillot. Aucune entreprise n’acceptait de nous faire confiance parce que ça avait quand même ébranlé la France sportive. On était descendu en deuxième division, on jouait contre Béziers, Gueugnon, contre Sète, contre Montceau-les-Mines. Le public était complètement effaré. Dans l’imaginaire de chacun, l’ASSE est un grand club et l’histoire de la caisse noire on va régler ce problème en un an ou deux et on repart comme avant. Mais non on ne pouvait pas repartir comme avant, il n’y avait plus rien il fallait tout reconstruire."

Pour finir, l'ancien président de l'ASSE entre 1983 et 1993 revient sur son bilan sportif qu'il juge bon : "Très positif. Cela dépend les objectifs que l’on définit. Je me suis trompé une fois je le reconnais : quand nous avions fini quatrième dans la lancée de notre remontée en première division, je pensais que nous avions l’équipe, les moyens, les structures humaines et financières pour continuer à grimper. Or, la place de quatrième a été très bien acquise par une très belle équipe, nous avions fait une très belle saison et derrière ça a moins bien marché. La place de quatrième est la plus belle place que j’ai obtenue et je pensais que ça allait continuer. J’ai fait l’erreur de dire : « l’année prochaine nous serons européens ». Nous ne l’avons pas été et nous avons avec mes élus pris le temps de la réflexion et nous avons bâti un projet d’entreprise qui partait sur des bases que nous avons bien analysées : Saint-Étienne n’est pas une ville riche. Le football a commencé à changer : l’arrêt Bosman, les étrangers arrivaient, les moyens financiers devenaient extrêmement importants et je savais qu’une ville comme Saint-Étienne malgré tous les efforts de sponsoring généreux, ne pourrait pas rivaliser. Donc mon positionnement n’était plus dire on sera européen, mais de dire qu’il faut que nous restions en première division, une équipe installée en première division. Pour ne pas faire comme Auxerre par exemple qui redescend cette année, ou Le Havre ou tant d’autres encore… Nous avions fait des efforts colossaux, on s’est battu comme des chiens (sic) pour remonter, maintenant il faut s’installer. On finit 15èmes, ça n’a aucune importance, on finit 17èmes, ça n’a aucune importance. On est encore en première division et chaque année on tente de progresser et c’est ce qu’on a fait. On a commencé à la 11ème place et on a terminé à la 7ème place. Je suis convaincu que s’il n’y avait pas eu tout un tas de choses, on aurait continué à progresser. Ce n’est pas moi qui le dit mais Sylvain Kastendeuch dans la préface du livre."


Retrouvez André Laurent dans le podcast Dessous de Verts en cliquant ici. 

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