🗞 Entretien croisé avec Dogon et Moreau, deux formateurs de l'ASSE

Formation | Publié le par Paul. R avec Joris. S | 4 commentaires

Les formateurs des jeunes stéphanois, dans les catégories U17 National et U19 National, se sont entretenus avec nous. Jean-Luc Dogon et Patrick Moreau, qui vont animer les semaines ensemble cette saison au sein du groupe "formation", nous expliquent leur manière de fonctionner et leur quotidien à l'AS Saint-Étienne. 

Qu’est-ce-que la restructuration des groupes de la formation change au quotidien pour vous ?
Jean-Luc Dogon : Au quotidien cela ne change pas énormément de chose si ce n’est que le groupe formation est un peu plus étoffé au niveau du nombre. Dans le staff, cela nous permet d’être un peu plus précis parce qu’on est deux formateurs, en plus de nos adjoints. En dessous, c’est un petit peu pareil, le groupe avenir a été étoffé aussi au niveau de l’encadrement, ce qu’on veut c’est être un petit peu plus précis. Sachant que ce sont des groupes plus jeunes.

Y-aura-t-il davantage d’interconnexions entre vos deux équipes ? Comment va se dérouler le travail pendant la semaine ?
Jean-Luc Dogon : Cette saison il n’y aura pas de "U19", ce sera des U18, c’est aussi pour ça qu’on a demandé à changer de terme, parce qu’on se rendait compte que moi dans mon groupe il n’y avait pas de U19. Les joueurs étaient un peu frustrés de ne pas jouer en 19 parce qu’ils s’entrainaient soi-disant avec un groupe U19 alors qu’il n’y en avait pas. On a essayé d’être un peu plus clair dans notre communication. On revient sur un groupe formation où les 17 et 18 sont ensemble, et les week-ends on prendra nos équipes respectives. On se séparera aussi les veilles de matchs.
Ce sera un peu plus difficile pour moi puisque je suis tributaire de la réserve. En général il garde ses joueurs. Je fais plus ‘sparring partner’ pour Pat’ (Moreau) les veilles de match, mais ce n’est pas quelque chose qui me dérange parce qu’on le faisait déjà quand on n'avait pas assez de joueurs, je faisais ‘sparring partner’ pour qu’il puisse mettre en place son équipe. Cela n’a pas évolué beaucoup à ce niveau-là mais c’est plus dans la semaine que cela permet à Patrick d’avoir pratiquement l’ensemble de ses joueurs avec lui. Son adjoint (Benjamin Petit) est en dessous avec le groupe "avenir" qui lui parle des trois-quatre joueurs qui peuvent monter.


"Les joueurs avaient une frustration mais pour quelque chose qui n’existait pas en fait"


Quel est l’intérêt d’un groupe commun pour les joueurs ?
Patrick Moreau : Ils avaient une frustration mais pour quelque chose qui n’existait pas en fait (ne pas jouer avec les U19 le week-end tout en s’entrainant avec la semaine, ndlr). Parce qu’il n’y avait pas de U19 dans ce groupe-là, mais vu que l’appellation dans ce groupe-là était "U19", pour certains c’était un petit peu délicat de redescendre et de venir jouer en U17. Mais en fait, c’était leur catégorie, il n’y avait pas de redescentes.

La saison passée était la première complète après l’épisode covid, comment la jugez-vous quelques mois après ?
Patrick Moreau : Je dirais que pour les 17, on a fait une bonne saison, on a joué jeune. Le premier objectif est de former des joueurs. Après le classement, ce qu’on fait du championnat, on s’en occupe à la fin. On a joué le haut du tableau pendant toute la saison avec une équipe jeune, il ne nous a pas manqué grand-chose pour aller au bout mais ce n’était pas un objectif au départ défini. On était content de la saison et de l’évolution des jeunes.

Jean-Luc Dogon : Au niveau des 19, cela rejoint un peu Pat’, parce que tous les week-ends on était l’équipe la plus jeune, on a joué vraiment très jeune. Je crois que le grand maximum qu’on a dû avoir c'est trois U19 dans le même match, la plupart du temps il y en avait un ou deux. Je pensais que ça allait être beaucoup plus dur, cela a bien réagi et on est à deux trois minutes d’accrocher les phases finales. Même si on n’oublie pas que ce n’est pas l’objectif premier, qui est de former des jeunes pour le haut niveau, le mieux possible. Mais on est des compétiteurs tous les deux, on veut former également des compétiteurs donc on s’accroche aussi à ça et ils ont plutôt bien répondu. On aurait aimé accrocher les phases finales, mais c’est un truc qu’on regarde plus en fin de saison, voir si on peut y arriver ou pas mais ce n’est pas notre priorité.
Il y a aussi eu la Gambardella, je suis déçu car on s’est fait éliminer au premier tour. C’est plus ça qui me gêne, on n’a pas très bien abordé le match contre Lyon mais même eux d’ailleurs. J’aurais aimé que cela se passe un petit peu plus tard pour qu’on ait plus de matchs comme ça à jouer car la coupe c’est un autre état d’esprit, une autre compétition et c’est aussi intéressant à jouer. Le petit regret que je peux avoir c’est ça, mais dans l’ensemble la saison et la progression des joueurs ont été intéressantes.

Comment trouve-t-on le juste milieu entre la formation et les résultats en formation ?
Jean-Luc Dogon : Je pense que c’est lié. Nous notre but c’est d’avoir un groupe solidaire, d’avoir une équipe parce que ce sont les valeurs du club. Si on arrive à les faire bien progresser, bien jouer ensemble, inévitablement l’équipe va se retrouver meilleure et les résultats vont arriver. Si on n’arrive pas à ça, on peut être en danger. Si on arrive à créer cette osmose, bien les faire travailler, et à bien les faire progresser, on va avoir des résultats. Si on a des résultats, on a des choses à aller gratter et c’est quand même plus intéressant. La progression du joueur va faire que l’équipe va se retrouver meilleure.


"Le principal, c’est de sortir des joueurs, c’est ça la formation. Sortir un maximum de joueurs pour l’équipe professionnelle"


Comprenez-vous l’impatience et l’exigence qu’il y a autour de la formation à la fois dans la progression de certains joueurs et des résultats ?
Jean-Luc Dogon : À la fois oui et non. Le truc qui me gêne un peu c’est que les gens n’ont pas toutes les données. Quand ils nous jugent, quand ils jugent les jeunes, quelque part ils voient les résultats. Mais il y a tellement de choses derrière qui pour nous sont notre priorité… Avant les résultats, il y a beaucoup de choses. Je la comprends parce qu’on a tous envie d’être premiers, faire des phases finales, gagner des coupes mais c’est trop facile ça. Donc oui je la comprends, mais il faut avoir toutes les données pour vraiment juger. Cela fait partie du jeu, mais il ne faut pas non plus être obnubilé par ça, je pense que le plus important c’est la formation. Le principal, c’est de sortir des joueurs, c’est ça la formation. Sortir un maximum de joueurs pour l’équipe professionnelle, mais aussi de former des joueurs qui vont partir et réussir ailleurs. Si on arrive à faire ça c’est qu’on aura fait des choses intéressantes.

Peut-on déjà parler d’identité de jeu spécifique dans vos catégories ?
Patrick Moreau : L’objectif est de le faire découvrir tous les systèmes parce qu’ils ne sont pas amenés à jouer d’une seule façon. Ils doivent être capables de s’adapter à ce qu’on va leur demander plus tard. Nous, on doit leur faire découvrir, surtout pour les 17. Il faut leur faire découvrir tous les systèmes possibles qu’ils sachent s’adapter, et savoir ce qui va leur être demandé dans chaque système. Alors bien-sûr, on ne change pas tous les week-ends. En préparation, on leur montre deux ou trois systèmes. Le but c’est de les former à être prêts pour le haut niveau.


"On a la chance ici d’être libre, de faire ce que l’on veut, on sait que l’on doit passer tout en revue et on ne nous impose rien du tout et je pense qu’on est dans le vrai"


Sur les positionnements aussi ?
Patrick Moreau : Il y a des joueurs que l’on fait jouer à plusieurs postes, ce qui leur permet de ne pas voir qu’un seul poste. Après, plus ils avancent, plus il faut les fixer à un poste pour qu’ils puissent s’habituer. On ne va pas mettre quelqu’un ailier, juste pour mettre quelqu’un ailier. Si on a un défenseur central qui est gaucher, on peut éventuellement le faire jouer arrière gauche pour le voir. Si on voit qu’il n’est pas à l’aise, on ne va pas insister, le but n’est pas de le mettre en difficulté.

Jean-Luc Dogon : Au dessus aussi on essaye de leur faire découvrir des choses. Il faut faire également attention à les mettre dans les meilleures conditions aussi, cela dépend aussi des joueurs que l’on a aussi à l’instant T : si je n’ai que deux attaquants, on ne va pas jouer à trois attaquants cela me paraît assez logique. Laurent (Batlles) est arrivé avec un système à trois derrière, c’est bien que les jeunes sachent ce que c’est de jouer à trois.
Il y a des clubs où dans les centres de formation il est imposé de jouer comme les pros. On a la chance ici d’être libre, de faire ce que l’on veut, on sait que l’on doit passer tout en revue et on ne nous impose rien du tout et je pense qu’on est dans le vrai. Parce que si demain ça change, il doit falloir réagir très vite. Il faut que les U19 qui montent en réserve soient préparés à ça.

Patrick, quel genre d’entraineur est Jean-Luc ?
Patrick Moreau : Il est exigeant avec les joueurs, et proches de ceux-ci. Humainement, au quotidien, c’est quelqu’un de facile avec moi, facile à vivre (rires).

Jean-Luc Dogon : Ça aurait pu être pire (sourire).

Même question pour vous Jean-Luc, quel genre d’entraineur est Patrick ?
Jean-Luc Dogon : Je pense que Pat’ est aussi exigeant, il est parfois un peu "raide", il est un peu plus directif que moi je pense sur les matchs par exemple, mais c’est peut-être la catégorie qui veut ça. Il est pertinent et sur les relations humaines on s’entend très bien, c’est quelqu’un qui est à l’écoute et je n’avais pas de doute sur le fait qu’on se retrouve ensemble et que cela ne "matche" pas. Dans le bureau, de par notre fonction, on est l’un à côté de l’autre. On parlait déjà beaucoup, je pense qu’on est sur la même longueur d’onde et je pense surtout qu’on a la même vision de la formation.

Patrick Moreau : On peut ne pas être d’accord par moments, cela permet d’échanger.

Quelles sont vos relations avec les autres formateurs ?
Jean-Luc Dogon : Je suis beaucoup plus en contact avec Raz’ (Nedder) et Patrick avec Kévin (De Jésus) ce qui est assez logique. Je ne me mêle pas de ce que fait Kevin car j’estime que ce n’est pas à moi de le faire, j’imagine que c’est la même chose pour Patrick concernant Razik. J’ai des relations saines et franches avec Raz’. Quand des choses ne vont pas, on se les dit en face, on parle un bon coup sans s’énerver et cela passe. J’ai de bons rapports avec Raz’, avec Lolo (Huard) également.

Que peut-on vous souhaiter messieurs pour cette saison ?
Patrick Moreau : De former plein de joueurs. Les faire progresser. L’année dernière j’ai pris beaucoup de plaisir, avec une équipe jeune. On n’a pas toujours gagné, il y a eu des matchs difficiles mais on était toujours avec des gamins qui avaient envie de bien faire, de se mettre au service de l’équipe. Les rapports étaient sains, on ne gagnait pas tout le temps, mais il y avait une progression et une évolution. Quand on voit des garçons évoluer cela nous fait plaisir.

Jean-Luc Dogon : Qu’il y ait beaucoup de progression, je veux prendre du plaisir. Cela fait partie aussi de la façon de jouer.


"Aiki ? Pour moi, ce n’est pas de la fierté. Je suis content pour le club, je suis content pour le gamin. Il faut bosser, il faut qu’il ait les qualités. S’il en est là c’est qu’il a les qualités"


Justement le plaisir vous le prenez quand vous voyez un jeune comme Ayman Aiki faire ses débuts en pro ? Il y a une certaine fierté ?
Jean-Luc Dogon : Pour moi, ce n’est pas de la fierté. Je suis content pour le club, je suis content pour le gamin. Il faut bosser, il faut qu’il ait les qualités. S’il en est là c’est qu’il a les qualités. Nous on est là, on essaye de l’aider un maximum mais s’il n’a pas les qualités, on n’est pas magicien… Je suis content pour lui, pour le club, pour la formation parce que c’est valorisant pour celle-ci.

Patrick Moreau : Cela veut dire qu’on a fait à peu près correctement notre travail.

Du coup le plaisir vous le prenez davantage sur le quotidien ?
Jean-Luc Dogon : Oui dans le quotidien, dans le relationnel avec les gamins. Je m’éclate.


"Quand on fait un match, et que ça se goupille comme tu as envie, que ça joue bien et que c’est beau à voir, c’est là que je prends le plus de plaisir"


Voir que l’ASSE reste en haut du classement des centres de formation, il n’y a pas ce sentiment de se dire que son travail au quotidien est reconnu ?
Jean-Luc Dogon : J’espère qu’il en fait partie. J’espère que j’ai participé à ça. C’est valorisant pour le centre, pour le club, pour beaucoup de choses. Cela prouve qu’on ne fait pas n’importe quoi, donc oui c’est plaisant je ne vais pas dire le contraire. Mais ce que je recherche ce n’est pas ce classement-là. C’est le relationnel avec les joueurs, avec mes collègues. Si je ne prends pas de plaisir à venir travailler, il n’y a aucun intérêt et je partirais. C’est comme de partout. Quand on fait un match, et que ça se goupille comme tu as envie, que ça joue bien et que c’est beau à voir, c’est là que je prends le plus de plaisir.


Les U17 Nationaux de l'AS Saint-Étienne retrouveront la compétition le 28 août prochain tandis que les U19 Nationaux reprennent le championnat dès ce dimanche, en déplacement à Istres. 

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