🎙 Entretien avec Razik Nedder, coach de la réserve de l'ASSE

Formation | Publié le par Paul. R avec Joris. S | 2 commentaires

Comme avant chaque début de saison, nous nous sommes entretenus avec l'entraineur de la réserve de l'AS Saint-Étienne : Razik Nedder. Avec lui nous sommes revenus sur la saison dernière en National 3, sur la formation stéphanoise mais aussi sur les objectifs qu'il se fixe à l'aube de l'exercice 2022-2023 qui commence ce dimanche pour ses joueurs. 


Quel bilan de la saison précédente fais-tu avec ton groupe ? 

Ça a été une saison que je trouve plutôt satisfaisante, on a vu des garçons avancer et des joueurs émerger. Aujourd’hui cela reste la fonction première d’une équipe réserve, emmener les garçons vers ce football d’adulte et de les faire performer. On a joué le haut de tableau, c’est toujours intéressant d’avoir cette carotte-là. On avait un ogre dans la poule (Evian Thonon Grand Genève) avec des moyens surdimensionnés pour la N3, c’est logique qu’un club comme ça monte vu les moyens et les investissements mis en place. Maintenant niveau contenu, on est satisfait de ce qu’on a pu faire. On a été un peu victime de notre succès sur la première partie de saison, là où des clubs se sont dits qu’ils allaient jouer une jeune équipe en venant nous chercher et nous agresser dans les pieds. Ils nous ont laissé des espaces et on a pu performer. La seconde partie de championnat a été plus difficile avec des équipes qui nous craignaient énormément. On a affronté des équipes à domicile ou à l’extérieur qui jouaient très bas. On a donc eu des difficultés pour déséquilibrer 11 joueurs en forme regroupés à 30 mètres de leur but prêts à tout pour défendre et rapporter quelques points. On a souffert dans ce compartiment là du jeu et c'est ce qui nous a empêché de continuer à engranger des points. Il y a eu des matchs avec 80%, 85% de possession de balle et tu perdais quand même sur un contre ou sur un ballon perdu. J’ai trouvé que la saison a été formatrice dans sa globalité pour nos joueurs. On a réussi à amener des garçons sur de la progression comme Ayman (Aiki), Antoine (Gauthier) ou Louis (Mouton) qui ont réussi à passer un cap. Quand on fait le bilan de la saison, on le fait aussi et surtout là dessus. 


Ce bilan que tu viens de faire, va te faire appréhender différemment la saison à venir ? 

C’est un championnat que l’on connaissait, on a la chance d’être dans une région très riche en terme de clubs de football mais aussi riche de moyens, les équipes de notre poule ont de vrais moyens pour travailler et recruter. Il y a de vrais beaux effectifs. On connait la difficulté de la N3, on ne l’a pas découvert l’an passé. On le vit comme une chance dans cette ligue Rhône-Alpes avec une N3 proche d’un niveau N2. C’est intéressant pour nous et pour la formation du joueur de se confronter à cette adversité. 


"Les objectifs ce sont toujours les mêmes, c’est de réussir à amener un maximum de garçons chez les pros." 

Quels sont les objectifs du groupe Réserve pour la saison à venir ? 

Les objectifs ce sont toujours les mêmes, c’est de réussir à amener un maximum de garçons chez les pros. L’an passé des garçons comme Bakayoko qui ont commencé avec nous ont terminé par faire des matchs titulaires. Aujourd’hui, c’est ce qu’on vient chercher sur une équipe réserve. Le centre de formation performe, ce n’est pas un jugement, c’est un constat et notre objectif c’est de continuer dans ce sens. C’est aussi ce qui permet de pérenniser le club sur certaines choses et notre rôle est celui-ci, continuer de former des joueurs pour performer là-haut (chez les pros) et être vendus dans un second temps. Les objectifs ce sont ceux-là, faire grandir nos joueurs de manière à ce qu’ils soient le plus performants possible avec l’équipe première. 


Et sur les résultats ? 

On joue tous les matchs pour les gagner, je pense que ça fait partie d’un axe de formation. La culture de la gagne, ça s’enseigne, cela se cultive. On va attaquer la saison avec un groupe qui à 80% va découvrir le monde sénior, celui qui est capable de me dire si on va performer et jouer le haut de tableau... On a du mal à avoir du recul là dessus, on va voir comment les joueurs vont digérer. Quand on a une jeune équipe, la première spirale va être importante, si tu ne doutes pas et que tu enchaines des victoires assez rapidement cela peut emmener le groupe dans le bon sens. Quant tu as une jeune équipe et que tu as des moments de doutes dans la saison, tu as du mal à switcher, ça met quelques matchs pour relancer la machine. On va dire que c’est la première partie de saison qui va déterminer ce qu’on va pouvoir faire derrière. On connait la difficulté de cette poule avec un effectif encore plus jeune que celui de l’an passé. 


"On a un coach (Laurent Batlles) qui n’a pas peur de faire jouer les jeunes, c’est positif pour les garçons qui regardent au dessus" 

Comment va évoluer ton groupe cette saison ?

En terme de nombre on est sur ce qui se faisait les années précédentes. On a un coach (Laurent Batlles) qui n’a pas peur de faire jouer les jeunes, c’est positif pour les garçons qui regardent au dessus et qui se disent par exemple : "Aiki, 2005 déjà deux titularisations". Automatiquement ça booste tout le monde, c’est positif. Il n’y a pas réellement de changement, on ne nous demande pas plus pas moins, on est dans notre projet de formation, dans notre travail. On n’a pas perdu en moyens au centre de formation, c’est un geste du club, ils savent que la formation a une place importante à l’ASSE et que l’on continue de bien travailler. 


Comment s’est déroulée ta préparation ? 

On a essayé d’alterner notre préparation avec des confrontations contre des réserves, en participant à un tournoi international d’un très bon niveau (Ploufragan), cela montre aux garçons une certaine exigence. On a essayé de jouer aussi contre des clubs amateurs plutôt costauds, des clubs de N2 justement pour que les garçons s’acclimatent et se rendent compte de la difficulté qui va faire face à eux. Aujourd'hui on est plutôt satisfait de ce qu’ont pu découvrir les joueurs, niveau contenu on va devoir passer un cap aussi, maintenant en terme de résultats c’est fou puisqu'on a gagné contre des équipes supérieures en division. C’est là où notre travail doit s’exprimer, d’accord il y a le résultat mais il y a le contenu de nos matchs, aujourd’hui on manque encore de maitrise et il va nous en falloir davantage pour traverser les matchs plus tranquillement sur le championnat de N3. On a cette capacité à se créer des occasions, à marquer des buts sur quasiment tous nos matchs amicaux, ça reste quelque chose de très dur dans le foot. On essaye de renforcer nos points forts, cette capacité à déséquilibrer et à faire mal et puis de corriger nos points faibles avec encore trop de cadeaux sur nos lignes défensives mais c’est aussi en lien avec la jeunesse de l’équipe. 


Cette jeunesse, comment vas-tu l’appréhender sur une année complète ? Il y aura deux saisons dans une saison ? D’abord l’apprentissage puis la confirmation ? 

Sur l’équipe réserve ce n’est pas propre à Saint-Étienne, aujourd'hui il y a toujours un début de saison avec des garçons en apprentissage. Au niveau des stats, les équipes réserves prennent plus de points sur la seconde partie de saison. C’est ce qui nous a coûté il y a deux ans lors de notre descente où on arrête le championnat à 10 journées de la fin, là où en théorie tu es dans une période où tu dois prendre le plus de points. On en est conscient mais on ne peut pas dire à nos joueurs d’occulter la première partie de saison et renier notre football afin de prendre des points pour se tranquilliser. Ce n'est pas du tout notre philosophie, ce n’est pas ma philosophe de travail, j’aime trop le football pour renier mes principes de jeu et le football que j’aime pratiquer. On doit être en capacité d’imposer notre jeu, à nous de travailler, de hausser notre niveau d’exigence sur les semaines d’entraînement. C’est notre travail qui va nous permettre d’amener les garçons à performer dans le football qu’on souhaite que l’inverse et de dire : "Attendez les gars, on va faire un football qui va nous permettre de performer et après on viendra sur le jeu".


"Je suis un coach qui aime la possession, qui aime avoir la maitrise du jeu, c’est mon cheval de bataille, je ne veux pas subir les matchs, je veux dicter les matchs"

Tu parles de tes principes de jeu, il y en a en communs entre un coach de la réserve et un coach de l’équipe première ? Quelle est ta relation avec Laurent Batlles dans le travail ? 

La relation est toujours plus simple quand on connait la personne, quand on a travaillé ensemble. On s’apprécie humainement, on a été dans le même bureau, ça a très bien fonctionné pendant quelques années mais ce n’est pas le fond du bon fonctionnement et des bonnes relations que nous avons. Le fond c’est le respect que l’on a l’un envers l’autre, le fait qu’on ait aussi les mêmes idées de jeu, la même philosophie du football. Je suis un coach qui aime la possession, qui aime avoir la maitrise du jeu, c’est mon cheval de bataille, je ne veux pas subir les matchs, je veux dicter les matchs. Si le coach des pros est dans un football de transition et qu’on est à l’opposé, il y a des moments où cela peut être difficile sur certains échanges, aujourd’hui ce n’est pas le cas avec Lolo (Laurent Batlles). On a cette chance de partager les mêmes idées, donc les relations sont très bonnes, en plus il connait mon poste, il connait nos difficultés. C’est toujours difficile d’imposer des choses à un entraineur d’une équipe réserve car il fait aussi souvent comme il peut plus que comme il veut. Les effectifs changent beaucoup, les conditions de jeu ne sont pas toujours idéales.


Des mouvements d’effectifs pourraient se faire dans le sens inverse avec des pros que tu récupèrerais ? 

En L1 ça jouait souvent les samedis, il n’y avait pas eu beaucoup de descentes du jour au lendemain. On sait ce qu’on veut faire en début de saison et puis il y a ce qu’on est réellement en capacité de faire une fois que la saison est lancée et que tout le monde est sous pression. Ce n’est jamais simple, bien-sûr dans l’idéal le temps de jeu des jeunes est une préoccupation de tout le monde. C’est le coach qui sera en capacité de nous dire si il y aura des retombées ou pas, il faut tenir compte des matchs, des blessés, etc... Il y a plein de considérations à prendre en compte.


Sur ton effectif de la saison, tu avais des joueurs à l’essai dans cette préparation, tu as eu des renforts ?

Namri va nous rejoindre, il y avait quelques joueurs à l’essai sur la période de préparation. On reste dans notre niveau d’exigence malgré les besoins qu’on peut avoir, on ne veut pas rentrer des joueurs pour les rentrer. Il faut être logique dans notre recrutement, il y a très peu de joueurs en post-formation qui vont nous rejoindre cette saison. 


"La réflexion se porte sur la formation du joueur, dans quel groupe a besoin d’être tel joueur à tel moment de sa formation pour progresser ?" 

Sur la nouvelle structure des groupes formations du club, quel regard vas-tu porter sur le groupe du dessous mené par Jean-Luc Dogon et Patrick Moreau ? 

Pour nous, ça ne change pas grande chose, notre groupe de travail est composé des meilleurs joueurs à partir des U17, les meilleurs s’entrainent avec la réserve. Maintenant la réflexion se porte sur la formation du joueur, dans quel groupe a besoin d’être tel joueur à tel moment de sa formation pour progresser ? Les mouvements ils se font surtout comme ça et ce n’est pas "je veux lui, je ne veux pas lui, je veux l’autre". Est-ce que même si c’est un 2006, il a besoin d’être dans l’adversité d’un groupe d’entrainement réserve ? Voilà on est dans cette réflexion. On reste sur cette logique-là, les joueurs qui ont besoin d’être dans le groupe réserve quelque soit leur catégorie d’âge le sont.


Ça fait 12 saisons que tu es à l’ASSE, quel est ton état d’esprit ? Sportivement c’est vrai que c’est difficile pour le club ces derniers temps...

Il y a deux choses, il y a d’abord l’aspect affectif où on vit une situation à l’échelle de l’ASSE qui n’est pas simple, j’ai le sentiment qu’une page s’est tournée et qu’on repart sur un nouvel élan, c’est comme ça que je vis les choses. Puis il y a le côté professionnel où aujourd’hui je pense avoir un rôle important dans la grande machine qu’est l’ASSE. On ne peut pas se permettre d’être abattu ou de baisser les bras. Je suis dans la volonté de mettre ma compétence au service de mon club quelque soit sa situation. On est jugé là-dessus, tu ne fais pas 12 saisons si tu es un bon mec ou si tu es sympa, tu fais 12 saisons si tu es compétent je pense. Je veux continuer à bien travailler à pouvoir faire performer à mon échelle les joueurs du centre quand ils arrivent à mon étage. Je fais partie d’un groupe de travail qui est la formation où nous sommes tous unis et soudés. On a des résultats intéressants à notre échelle, pour autant on n’est pas dans notre coin à faire notre boulot, non, on bosse pour un club et pour une institution. On a vu que les ventes récentes de certains joueurs issus du centre de formation permettent de pérenniser notre club, ça nous motive et ça nous donne envie de travailler plus. L’état d’esprit c’est le même : être compétent, bien faire son travail et aider le club à écrire cette nouvelle page. 


"C’est un geste fort qu’a fait la direction mais c’est aussi la conséquence du travail de tout un staff"

C’est rassurant quand on travaille sur la formation de voir que rien n’a changé dans la structure des staffs malgré la descente ?

Oui, je pense que c’est un geste fort qu’a fait le club. On remercie le club d’avoir pris cette direction-là, c’est une force pour nous mais c’est aussi quelque chose que nous sommes allés chercher car on a bien fait notre travail. Il n’y a pas de miracle, si en réduisant les effectifs on faisait le même travail, cela aurait été fait. Tout le monde bosse, tout le monde bosse dur, tout le monde fait preuve de compétence. La volonté c’est bien mais ce mot compétence je le trouve important, c’est ce qui doit être la ligne de conduite de toute entreprise. Aujourd'hui c’est ça, les effectifs n'ont pas été réduits car je pense que se séparer de certaines compétences au sein du centre de formation aurait été préjudiciable pour l’efficacité de ce centre. C’est un geste fort qu’a fait la direction mais c’est aussi la conséquence du travail de tout un staff. 


Laurent Huard parlait d’interconnexions entre les services comme base du nouveau projet formation, quel rôle joues-tu en tant que coach de la réserve ?

On a la chance d’avoir un groupe de travail soudé, on a des staffs bien entendus (U19, N3, U17) mais on est avant tout une équipe sur la formation. On travaille tous ensemble avec des joueurs qui naviguent entre les groupes, des garçons qui s’entrainent toute la semaine avec moi et qui arrivent juste le jour du match avec les U19. Lolo (Laurent Huard) a cette capacité à fédérer. Deux mots nous unissent : passion et compétence. On est vraiment là dessus dans nos échanges et c’est ce qui nous permet d’avancer tous ensemble dans un bureau sain où l’ambiance est bonne. On prend beaucoup de plaisir, chacun met sa compétence au service du centre de formation. 


Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la saison à venir ? 

L’idée c’est que la réserve vive une saison qui va nous permettre de faire travailler les garçons dans les bonnes conditions. En terme de résultats qu’on soit en capacité d’engranger des points qui nous feront évoluer dans une atmosphère sereine. Personnellement après c’est de continuer à développer mes compétences, toujours faire plus, c’est ce que je souhaite, travailler plus, travailler mieux. Ce sont mes objectifs pour cette saison. 



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