🗞 Entretien avec L. Huard, directeur du centre de formation de l'ASSE

Formation | Publié le par Paul. R avec Joris. S | 17 commentaires

Arrivé avec le sourire et l'envie de parler de formation, Laurent Huard s'est présenté face à notre caméra ce jeudi midi. Dans une démarche d'apprentissage autour de l'humain mais aussi de la compétition, il développe avec nous le projet de la formation à l'ASSE. 



Bonjour Laurent, revenons sur l'élaboration de la nouvelle structure de formation avec trois nouveaux groupes : Avenir, Formation et Réserve ? Peux-tu nous expliquer un peu le projet ? 

L'idée principale c'est de dégager trois groupes d'entrainement pour quatre compétitions. C'est une idée qui existait déjà avec les U16 et les U17 la saison dernière. Sur l'appellation en elle-même, on a décidé de rester humble, notamment sur le groupe Réserve qui ressemble de plus en plus à un groupe professionnel de par son staff. Je sais que dans certains clubs, on parle de groupe "Pro2" mais on a préféré garder l'appellation réserve. C'est un choix du club.

Concernant le groupe Formation, le gros du travail doit être fait, avec l'ancienne appellation (U19 et U17), les joueurs étaient trop focus sur la compétition en elle-même et parfois il y avait une petite adaptation ou une digestion de (re)venir jouer en U17. Maintenant on oublie les catégories d'âges, on crée un groupe Formation de travail pour progresser et s'améliorer avec des joueurs au sein de ce groupe qui avanceront à des vitesses différentes. Le week-end par contre, retour à la compétition. 

Enfin il y a le groupe Avenir, avec une majorité de joueurs qui arrivent au centre que ce soit nos jeunes de la pré-formation ou ceux de l'extérieur. Le week-end il y aura également des joueurs du groupe avenir qui vont postuler à jouer en U17.


C'est la réforme de la FFF sur la réduction du nombre de conventions au sein des clubs pros qui a contraint à cette nouvelle organisation ?

Nous sommes passés à un nombre de conventions de 70 (ndlr : au lieu de 80 avant la réforme). On a du coup l'obligation de développer chaque joueur un peu plus. Il ne peut y avoir aucun joueur de côté, on a l'obligation de raccrocher tout le monde même ceux un petit peu plus loin. J'ai beau avoir quelques années de formation derrière moi, je n'ai aucune vérité sur l'évolution d'un jeune joueur. En aucun cas je dis à un jeune qu'il n'y arrivera jamais, on ne connait pas le parcours de chacun, je m'interdis de le dire. Ce nombre plus réduit nous permet de travailler avec tout le monde et d'accompagner les joueurs. On est aussi un club professionnel, notre résultat du centre de formation c'est quand même de sortir des joueurs qui postulent et qui alimentent l'équipe première.


"On a des bons joueurs, il faut en faire de très bons joueurs"

Il y aura donc un groupe de travail commun la semaine et une préparation des matchs pour le week-end ? 

La préparation du match s'effectuera en fin de semaine. Je considère que l'aspect compétiteur dans un club professionnel est important, on doit le cultiver. Les jeunes doivent développer cela dans les entrainements et dans les exercices mais après nous sommes aussi dans une logique de formation, on ne mettra pas forcément tous nos atouts sur la préparation d'un match. Le joueur doit se développer, il y a beaucoup de choses à travailler la semaine, on a des bons joueurs, il faut en faire de très bons joueurs. Il faut que cela devienne des pépites. Pour cela on doit faire des choix et passer du temps davantage sur le développement du joueur, de la formation. Du coup il y aura peut-être dans ce cadre-là un petit moins de préparation du match du week-end dans la semaine de travail mais ça ne veut pas dire qu'on ira disputer la rencontre pour ne pas la gagner. On va mettre tous les atouts pour développer le joueur. Même si on arrive un peu plus fatigué, en jouant un peu plus jeune, c'est un challenge supplémentaire.


La saison dernières deux équipes sont passées très proches des playoffs (U17 et U19), la réserve a joué la montée une grande partie de la saison, au-delà de la logique de formation, cela fait partie des objectifs ?

Complètement ! On reste des compétiteurs. Quand je parle de formation, ces matchs-là on a envie de les jouer. Ce sont des outils supplémentaires pour progresser. Ce sont des matchs avec de l'enjeu, on a envie que nos joueurs connaissent ça. Quand on prend du recul sur la saison, on se dit que sur certains matchs on a laissé des points à tel endroit, dans telle rencontre car on jouait plus jeune. Il ne faut pas avoir de regrets ! Il y a toujours une petite déception mais ce qu'il en ressort globalement ensuite c'est la fierté de voir des joueurs avancer et grandir. C'est un choix assumé dès le départ (de jouer jeune). Cela aurait encore été plus valorisant pour les coachs d'y arriver dans cette formule-là.


Tu comprends l'attente des supporters sur les résultats de l'ASSE même au sein des jeunes catégories ?

On est des compétiteurs, on veut gagner c'est clair ! Après on sait qu'on va peut-être y aller avec des joueurs plus jeunes et des joueurs qui avancent bien pour qu'ils soient prêts dans leur progression à évoluer dans les catégories supérieures et donc pour les supporters qu'ils trouvent de meilleurs jeunes joueurs quand ils arrivent en équipe première. 

Comment tu définis le projet de la formation stéphanoise sous ta direction ?

Alors ma direction... je suis un élément du fonctionnement ! L'idée dont on parlait un peu avant ce sont les interconnexions entre les équipes et que tout le monde travaille ensemble. Par exemple, j'ai appris à travailler avec Patrick Liogier (Responsable de l'école de foot), je trouve qu'il travaille bien. Il arrive à donner envie à nos jeunes de la région de venir jouer à l'ASSE, des jeunes à qui on propose un projet qui n'est pas basé sur un "one shot". Tu n'arrives pas à l'ASSE et on te renvoie dans ton petit club. Non, le projet c'est : tu as bien travaillé dans ton club et nous on continue de te faire avancer. Idem pour la préformation avec des personnes comme Jean-Philippe Primard, Frédéric Dugand et Romain Marée qui sont dans la continuité de l'école de Foot. J'ai appris à connaitre tous ces passionnés, ils ont la fibre club et se sont adaptés avec les jeunes avec lesquelles ils travaillent. Il y a un travail de fond de fait avec les jeunes, avec des encadrants qui sont épanouis.


"Tu veux aller là ? Et bien met ce qu'il faut en face pour jouer à 18 ans à Geoffroy-Guichard" 

C'est intéressant cette remarque, on parle de formation des joueurs mais il y a aussi un rôle de formation des coachs au centre ? 

Je vais parler de Sainté mais j'ai eu la chance de travailler dans des clubs avec une émergence de coachs (Rennes, PSG) qui sont nombreux. Je pense que c'est important, on doit avoir une fibre de club formateur avec les joueurs mais aussi avec les éducateurs. Si on veut que les joueurs grandissent il faut aussi avoir des entraineurs qui grandissent. L'un ne va pas sans l'autre. Ce qui a été fait par la direction avec Loïc (Perrin), Samuel (Rustem) et Jean-François (Soucasse) par exemple d'intégrer Jean-François Bédénik au staff professionnel, c'est un message très positif d'envoyé aux éducateurs, ils peuvent évoluer à l'ASSE. 


Comment tu composes avec les attentes sur des joueurs de plus en plus jeunes ? 

Mon travail c'est de faire comprendre et même si tout le monde sait que des joueurs comme Mbappé sont des exceptions... Tout le monde a envie et pense qu'il est capable de faire aussi bien, si lui il l'a fait, pourquoi pas moi ? Jouer la Ligue des Champions à 17 ans, je peux le faire. C'est bien d'être ambitieux mais ce qui importe c'est de se donner les moyens et de définir le projet de chaque joueur. Quand je parlais d'accompagnement, on a fait en sorte avec le club d'avoir un staff avec pratiquement quatre personnes pour chaque groupe d'entrainement, le coach, un adjoint, un préparateur athlétique et des entraineurs des gardiens. Il faut accompagner les jeunes pour que le projet ne porte pas que sur une animation de séance et que chaque joueur ait des retours en terme de vidéo mais aussi dans la préparation mentale. Tu veux aller là ? Et bien met ce qu'il faut en face pour jouer à 18 ans à Geoffroy-Guichard. Et s'il te manque ça ou ça et bien tu continues de travailler pour que ça arrive à 19 ans ou 20 ans. Le club nous donne les moyens de le faire avec du monde dans le staff qui accompagne, à moi de faire grandir ces équipes, ce sont des gens qui travaillent beaucoup. Il y a un engagement dans ce qu'ils font et le club nous permet de le faire. 


"Le club a vu notre investissement, le staff de la formation est le même malgré la L2, les éducateurs donnent beaucoup "

Malgré la descente en L2 ? Vos effectifs à la formation n'ont pas changé ? 

Non justement, on nous a permis de garder notre staff et notre fonctionnement, les éducateurs donnent beaucoup, le club en retour a vu qu'il y avait un investissement et que cela travaillait. On a voulu continuer à avancer et le club ne voulait pas nous couper dans cet élan-là, je remercie le club par rapport à ça. Mais bon on a encore du chemin à faire comme je le disais dans l'accompagnement mental, humain, chaque joueur qui va devenir un homme, il faut qu'on puisse l'accompagner du mieux possible. 


Dans la transition entre le centre de formation et les pros, comment se passent les contacts avec le staff du coach principal ?

La chance que l'on a c'est le lieu déjà (tout le monde s'entraine au même endroit, ndlr) et puis nous avons des personnes qui sont passées par le centre de formation comme Laurent Batlles, Jean-François Bédénik ou Sebastien Sangnier. Notre bureau pour eux c'est encore un peu leur bureau, ça nous permet de discuter et d'échanger. Laurent (Batlles) échange avec Razik (Nedder) sur les entrainements, sur les équilibres d'effectif.


La L2, paradoxalement est-ce qu'on peut parler d'opportunité pour des jeunes joueurs du centre ?

Je vois ce que tu veux dire mais on doit garder une exigence très haute au niveau de la formation. Peut-être que cela va offrir des opportunités sur certains jeunes joueurs qui devaient encore passer par l'étape réserve et qui pourront rentrer dans l'effectif, ça ouvre peut-être des portes pour certains. On ne va pas se cacher aussi que le nerf de la guerre c'est l'argent et qu'au lieu de prendre un joueur de l'extérieur qui arrive pour compléter l'effectif, aujourd'hui un club formateur doit être capable de s'auto-exiger sur des joueurs de compléments ou des doublures qui viennent du centre de formation a minima. Ensuite le top c'est d'avoir des joueurs qui s'imposent en équipe première comme des titulaires à part entière et avec un potentiel énorme. (Ndlr : 16 joueurs formés au club ont porté le maillot des Verts la saison passée). 


L'intégralité de l'entretien est à retrouver dans le player vidéo en tête d'article. 


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