🎙 Annan : "Il faut qu'on marque l'histoire de l'ASSE"

Rencontré à L'Etrat quelques jours avant le match contre Grenoble qu'il n'a pas pu disputer à cause de sa blessure à la cheville, Ebenezer Annan s'est longuement confié à notre micro. Il semble ravi d'être arrivé à l'AS Saint-Étienne, club dont il veut marquer l'histoire.
Bonjour Ebenezer, tu es là depuis environ un mois à Saint-Étienne, comme te sens-tu et comment sont les débuts pour toi ?
Je me sens très bien. Être ici pour moi, c’est un peu comme être en Italie où j’ai vécu. Je me sens très bien, les joueurs ici sont vraiment sympas, comme le coach, le staff et tout le monde ici au club. Ils sont disponibles pour discuter dès que tu en as besoin.
Augustine Boakye, lui aussi ghanéen, est arrivé un an avant toi à l’ASSE. A-t-il facilité ton intégration ?
Oui bien-sûr, c’est beaucoup plus facile pour moi d’arriver dans un club où un compatriote évolue déjà. Si j’ai une question, j’ai simplement à lui demander. Il comprend ma langue et parle anglais également.
Le connaissais-tu avant d’arriver et as-tu eu une discussion avec lui avant d’arriver ?
Oui je le connaissais mais pas personnellement. Non, je n’ai pas eu de discussion avec lui avant d’arriver mais quand je suis arrivé ici, j’ai parlé avec lui et il m’a dit que ce club serait très bien pour moi. Il m’a donné quelques conseils. Il m’a également dit qu’ici, tout le monde était très sympa, très accueillant mais que cela dépendait aussi de comment je m’entrainais, de la manière dont je me battais pour le club et mes coéquipiers. Il m’a dit que si je me battais, tout le monde m’aimerait. Je me suis alors dit que j’avais tout à faire.
"Quand j’ai foulé la pelouse, je me suis dit ‘wahou’ (sic), cet endroit est vraiment différent !"
Connaissais-tu Saint-Étienne avant d’arriver et as-tu été surpris par le club, les supporters, le stade ?
J’avais entendu le nom oui. J’ai été très surpris (sourire). Je n’avais jamais évolué dans un stade plein comme ça (face à Rodez, ndlr). Pourtant, on m’a dit qu’il n’était même pas plein ce jour-là (sourire). J’étais vraiment surpris. Quand j’ai foulé la pelouse, je me suis dit ‘wahou’ (sic), cet endroit est vraiment différent ! J’étais vraiment content de pouvoir évoluer ici. C’est ce qui m’a donné la confiance de jouer, j’ai vu l’amour que les supporters nous transmettent, on doit le leur rendre.
Ça a été difficile pour toi de rester calme dans ce genre d’ambiance, après quelques minutes de jeu tu as notamment pris un carton jaune ?
Oui, je voulais prouver aux supporters que j’étais là pour me battre pour le maillot, pour jouer, pour faire en sorte que tout aille bien pour nous. Je dois tout donner pour le club et ses supporters.
Ce ne fut pas difficile d’arriver à quelques jours de la reprise de la Ligue 2 ?
Pour moi, je suis toujours dans une démarche de prouver que je suis capable de le faire. Même si c’est dur, je dois garder le courage pour jouer et faire le job. Tout est possible pour faire que tout aille bien.
Que penses-tu de tes performances sur ce début de saison ?
Je pense que je n’ai pas fait les meilleures performances possibles mais que ce sera de mieux en mieux match après match.
Il y a malheureusement cette blessure à Boulogne, comment gères-tu cette période ?
Je suis vraiment triste de m’être blessé, c’est la première fois que je me blesse au football. C’est une période un peu compliquée car je n’ai pu jouer que trois matchs avant de connaître cette blessure. C’est vraiment dur pour moi.
Tu évoquais ton passage en Italie. C’était un choix d’évoluer là-bas ?
Ce n’était pas un choix, c’est là où j’ai grandi et l’endroit où j’ai commencé à jouer au football.
À quel âge es-tu arrivé en Italie ?
Je suis arrivé très jeune en Italie, je ne m’en rappelle pas. J’ai été à l’école en Italie donc j’étais vraiment jeune. C’est ce qui a fait que ça a été un peu plus facile de jouer au foot là-bas.
"J’ai ressenti le racisme plusieurs fois. Mon père me disait que c’était normal, que je devais m’habituer à ça."
Quels souvenirs gardes-tu de la vie en Italie, la vie était facile pour toi ?
Je me souviens des balades dans le centre-ville et que j’étais toujours en train de déconner avec le staff à Bologne. Quand j’étais jeune, ça a parfois été très difficile. J’ai ressenti le racisme plusieurs fois. Mon père me disait que c’était normal, que je devais m’habituer à ça. Avec le temps, c’est allé de mieux en mieux mais je continue de penser régulièrement à ça, à la manière dont j’ai été traité mais je dois l’oublier et passer à autre chose.
Tu arrives ensuite en Serbie, comment ça se passe là-bas ?
En Serbie, dans ma première équipe (Novi Pazar, ndlr), c’était différent, comme à l’Étoile Rouge de Belgrade où c’était encore différent. À Novi Pazar, les gens étaient sympas, ils voulaient te parler tout le temps et ils étaient tout le temps derrière nous. Même quand ça n’allait pas sur le terrain. À l’Étoile Rouge, c’était différent. C’était parfois tendu à l’entrainement quand les supporters venaient.
L’ambiance au stade est-elle comparable entre l’Étoile Rouge et Saint-Étienne ?
C’est différent, l’ambiance est différente ici comme je le disais. Je l’ai senti bien meilleure ici. À l’Étoile Rouge, tu peux ressentir ce genre d’ambiance uniquement pour les gros matchs ainsi que pour les matchs de Ligue des Champions. Pour les matchs normaux, tu ne ressens pas ça alors qu’ici tu ressens cette ambiance même pour les matchs normaux. Je pense que si on se qualifiait pour l’Europe avec Saint-Étienne, ce serait encore une meilleure ambiance.
Peut-être lors d’un derby contre Lyon la saison prochaine également ?
Oui, je sais qu’avec cette équipe, on va monter en Ligue 1 !
As-tu jouer des derbies contre le Partizan en Serbie ?
Oui j’en ai joué deux, c’était vraiment bien. J’en ai gagné un et j’ai fait un match nul.
Tu es donc prêt à éventuellement affronter Lyon la saison prochaine en cas de montée ?
Je suis toujours prêt pour disputer des derbys !
Quelles sont les différences les plus importantes entre les footballs que tu as connus ?
En Italie, c’est un football plus agressif, même en U19. Ils aiment jouer plus agressifs. Ce sont des matchs avec beaucoup de courses. En Serbie, c’est différent, on trouve un coéquipier et on bouge derrière. En France, il y a un peu des deux, un côté agressif avec des courses mais aussi du jeu. Ici c’est un football plus difficile je trouve. Si tu n’es pas préparé, tu ne peux pas jouer.
Connaissais-tu la Ligue 2 avant d’arriver ?
Non je ne connaissais pas. J’ai joué en Serie C en Italie et j’ai trouvé ça plus dur que la Serie A. Les matchs sont plus hachés, beaucoup plus décousus, avec énormément de courses offensives et défensives pendant 90 minutes. Ici, c’est différent. On veut jouer, on veut avoir de longues phases de possession.
Ça a été un choix difficile pour toi de rejoindre une seconde division alors que tu évoluais en première division en Serbie ?
Pour moi, ça n’a pas été un choix difficile car je voulais quitter l’Étoile Rouge de Belgrade donc dès que j’ai eu l’information que Saint-Étienne me voulait, j’ai répondu à mes agents que je voulais y aller. Je voulais venir à Saint-Étienne.
Qu’est-ce que les dirigeants stéphanois t’ont dit pour te convaincre de venir ?
J’ai parlé avec eux, ils m’ont tout expliqué par rapport au club et j’ai compris que c’est un club qui allait m’aider à m’améliorer et c’est pour ça que j’ai choisi de venir à Saint-Étienne.
T’es-tu entretenu avec Eirik Horneland également, notamment à propos de sa philosophie de jeu ?
Oui je me suis entretenu avec lui. C’est une philosophie de jeu qui me correspond. Dans toutes les équipes dans lesquelles j’ai évolué, il y avait des différentes philosophies de jeu. Quand je suis arrivé, j’ai parlé avec le coach et je lui ai dit la façon dont j’aimais jouer. Je dois maintenant suivre la philosophie de jeu de l’équipe.
"J'aime beaucoup Roberto Carlos et quand j'ai commencé à jouer, on me disait que je ressemblais à Alphonso Davies"
As-tu des modèles à ton poste ?
J’aime beaucoup Roberto Carlos. Je regarde souvent des vidéos de lui, il était vraiment rapide, fort, avec une frappe exceptionnelle. Je m’entraîne pour devenir comme lui. Actuellement, j’aime beaucoup Alphonso Davies, je regarde beaucoup ses performances, sa manière de jouer, de courir. Quand j’ai commencé à jouer, beaucoup de gens m’ont dit que je jouais comme Alphonso Davies. Donc j’ai arrêté de regarder Roberto Carlos pour regarder Alphonso Davies (sourire).
Quel style de latéral es-tu ?
C’est très difficile pour moi de rester en défense. J’ai toujours envie de courir. J’aime davantage le travail offensif pour créer des occasions. Défendre, je n’aime pas vraiment ça même si j’aime me battre tout le temps. Ce que j’apprécie vraiment, c’est de créer des occasions pour marquer des buts.
Les statistiques sont importantes pour toi ?
Oui c’est très important. Si tu es un défenseur qui marque ou qui fait des passes décisives, tu fais la différence. C’est ce qui attire également les grandes équipes.
As-tu des objectifs chiffrés là-dessus cette saison ?
Je garde toujours en tête de créer beaucoup d’occasions pour l’équipe. Généralement, pour la première partie de saison je me fixe comme objectif cinq ou six passes décisives et peut-être marquer deux ou trois buts. Pour la saison complète, j’aimerais faire une dizaine de passes décisives et marquer quelque chose comme cinq buts (sourire).
"Si je pars un jour, je veux qu'on se souvienne de moi"
Quels sont tes objectifs cette saison ?
Je veux monter en Ligue 1. Je veux faire partie de ce groupe et qu’on soit la meilleure équipe de Ligue 2. Il faut qu’on marque l’histoire. Je suis allé au musée des Verts, j’ai vu que le club avait déjà une grosse histoire. C’est vraiment incroyable mais je veux écrire une nouvelle histoire ici ! Si je pars un jour, je veux qu'on se souvienne de moi, comme ce que j’ai vu dans le musée.
Veux-tu t’inscrire dans la durée ici ?
Oui je veux. J’ai eu des sentiments incroyables en arrivant ici donc je veux rester ici longtemps pour connaître le maximum de belles choses avec cette équipe. (…) Beaucoup de personnes me respectent désormais parce que joue à l’ASSE. Des personnes de mon entourage m’ont dit : « l’ASSE est vraiment un grand club ». On m’a dit que j’arrivais dans un très grand club avec une grande histoire. Je pense que ces gens me respectent parce que je joue ici.
"Un ami m'a dit que je devais aller à l'ASSE. Je lui ai répondu « Bro, tu n’avais pas à me le dire, je le savais déjà » (rires)"
Au Ghana, l’ASSE est-elle connue ?
Oui au Ghana on connait Saint-Étienne. Même en Serbie. Quand j’étais en Serbie et que j’ai dit à un ami à moi que Saint-Étienne s’intéressait à moi, il était choqué et m’a dit que c’était un bon choix pour moi et que je devais y aller. Je lui ai répondu « Bro, tu n’avais pas à me le dire, je le savais déjà » (rires).
Strahinja Stojkovic est arrivé juste après toi, tu as pu l’accueillir ?
Je ne savais pas qu’il allait arriver, quand il a signé j’étais dans ma chambre et quelqu’un a frappé à la porte, je suis allé ouvrir et je l’ai vu (sourire). Je lui ai dit : « qu’est-ce que tu fais là ? » Il m’a dit qu’il nous rejoignait. J’étais très content parce que je me sens très à l'aise avec lui vu que je le connaissais de l’Étoile Rouge.
Parmi tes objectifs, en as-tu avec la sélection du Ghana ?
Oui, je voulais vraiment jouer la CAN mais malheureusement on a été éliminé (par le Nigéria, ndlr). Actuellement, on dispute les qualifications pour la prochaine Coupe du Monde, on veut vraiment se qualifier.
C’est un rêve de porter le maillot du Ghana ?
Oui. Avant, je voulais jouer pour l’Italie mais mon père a fait le choix (sourire). Il m’a dit que j’étais du Ghana et que je devais jouer pour le Ghana (rires). Je suis vraiment content de jouer pour le Ghana.
Tu parles de ton père, ta famille a pu venir à Saint-Étienne ?
Ma sœur est venue avec moi et je pense que mon père viendra me voir jouer bientôt. (…) Ma mère est au Ghana et mon père est en Italie. Mes deux sœurs vivent à Londres et la plus jeune est avec ma mère. Quand j’ai des break assez longs, j’essaye d’aller tous les voir. Je leur ai déjà dit que cet endroit était vraiment cool et qu’ils devraient tous venir ! (Sourire)
Quelle relation as-tu avec ton père ? L’as-tu au téléphone après tes matchs ?
Après mes matchs, on s’appelle, on parle du match. On analyse la première mi-temps, la seconde mi-temps. Il me dit les erreurs que j’ai fait. Il a joué au foot également donc il me donne des conseils. Il m’a notamment dit que ce carton jaune n’était pas bon. Je lui ai répondu que je voulais prouver aux supporters que j’étais là pour jouer pour eux.
Quels sont tes hobbies en dehors du football ?
J’aime bien jouer au volley. J’aime les sports où il faut courir et sauter. Je regarde du volley à la télé, de base c’est le sport que j’aurais aimé faire. Néanmoins, je regarde un peu moins maintenant, j’ai vraiment envie de me concentrer sur ce que j’ai à faire ici. J’aime également sortir avec des amis mais pas en discothèque, davantage dans des restaurants.
As-tu eu le temps de visiter la ville ?
Non pas encore, j’ai pu visiter le musée des Verts. J’ai envie de la visiter et je vais y aller quand j’aurais du temps libre, avec un guide de l’équipe, peut-être Aïmen (Moueffek), je dois lui en parler, c’est un bon gars (sourire).
"Je n’ai jamais été reçu comme je l’ai été ici. Dans aucune équipe"
Quelle était l’ambiance dans le groupe quand tu es arrivé ?
Elle était vraiment bonne. Ils m’ont très bien accueilli, j’étais vraiment content. Je n’ai jamais été reçu comme je l’ai été ici. Dans aucune équipe. Je suis vraiment content d’avoir rejoint la bonne équipe.
Avec quel chanson as-tu été bizuté par l’équipe ?
Je n’ai pas chanté, mais j’ai dansé pour le bizutage (rires). Ils ont mis de la musique et j’ai dansé (sourire).
Tu nous parlais de moments très durs en Italie. En France, comment cela se passe pour toi par rapport à tes précédentes expériences ?
Je me sens mieux ici. Je me sens mieux accueilli même si à Bologne ça se passait plutôt bien mais dans les autres villes c’était plus compliqué et parfois très difficile pour moi.
Pour finir, qu’est-ce que l’ont peut de souhaiter pour la suite ?
Me souhaiter bonne chance et d’enlever rapidement ça (la botte qui tient sa cheville, ndlr), parce que je n’aime pas trop ça. De terminer le plus haut possible avec l’ASSE en Ligue 2 et une belle vie en dehors.
